Sainte Anne Trinitaire > Santa Anna Metterza en Italie

Réminiscences léonardesques




C’est un lointain souvenir de Léonard qui inspira Andrea Sansovino lorsqu’à la fin de son séjour romain il sculpta, en 1512, un groupe d’Anna Metterza pour l’église San Agostino30. Sainte Anne, devenue âgée, ridée, enserre les épaules de Marie, plus petite, assise à côté d’elle, dont le visage impassible a été copié d’une Vénus antique C’est dans les croyances de son pays d’origine que le protonotaire apostolique Johann Goritz, de Trèves, a puisé l’idée d’associer Anne à ses fins dernières, car elle y symbolise la terre mère qui donne la vie et accueille les morts. Le monument funéraire, démembré en 1760, puis reconstitué, est décoré d’épitaphes grecques et latines rédigées par un autre humaniste, Egidio da Viterbo, relatives à la généalogie du Christ annoncée par Isaïe, représenté sur la fresque de Raphaël qui couronnait cette composition grandiose.



Nous retrouvons un autre écho de Léonard dans la pala que peignit, vers 1518, Girolamo dai Libri pour l’église Santa Maria della Scala, à Vérone, où le culte de sainte Anne est attesté dès le XIVe siècle31. Mère et fille, assises côte à côte sont les deux rameaux d’un même arbre, celui, chargé de citrons, qui se dresse derrière elles. Anne, qui enserre Marie de son bras gauche, n’est pas dominatrice mais tendrement protectrice, et c’est la Vierge, seule, qui présente l’Enfant debout, bénissant. Il tient une branche d’olivier, allusion probable à la fin du Siège de Vérone, en 1516. La différence d’âge est à peine perceptible et ce sont surtout les couleurs qui permettent de distinguer les vêtements. Un treillage fleuri de roses, évoquant l’Hortus conclusus, sépare le groupe de l’arrière-plan où l’on retrouve le paysage rocheux et, à droite, l’arbre feuillu de Léonard. Les trois anges musiciens, au pied du trône, sont empruntés aux compositions de Giovanni Bellini.




Bernardino Luini s’inspira directement du carton Burlington pour peindre une Sainte Famille qui transforme le thème initial. Sainte Anne devient Elisabeth, Jésus joue avec son cousin Jean-Baptiste et, signe annonciateur des temps nouveaux, saint Joseph est introduit à droite de la composition32.

30 J.Pope Hennessy, Italian High Renaissance and Baroque Sculpture, fig.48. Voir l’analyse détaillée de Anja Zeller, op.cit.,p.42-46.

31 Londres, National Gallery, reproduite dans Catalogue 2012, fig.109 La toile était au centre d’un triptyque dont les volets représentaient les saints anti-pesteux Roch et Sébastien, qui avaient sauvé Vérone de l’épidémie survenue en 1510-1512. Une inscription, aujourd’hui effacée, devait préciser la fonction d’ex-voto de la peinture. Comme dans l’œuvre de Sodoma, sainte Anne est donc invoquée ici contre la peste. Anja Zeller, op.cit., p.68, note 382, cite d’autres œuvres où sainte Anne joue ce rôle (p.66-69), notamment un tableau maniériste de Crancesco Ceroto, daté de 1512, conservé à San Fermo de Vérone.

32 Milan, Pinacoteca Ambrosiana, datée vers 1530. Etudiée et reproduite sous le titre « Vierge à l’Enfant avec sainte Anne, saint Joseph et saint Jean Baptiste enfant » dans Catalogue 2012, n°100. Citons aussi une toile du génois Luca Cambiaso (1570), conservée dans l’église San Lorenzo de Gênes.